Relations nappes/rivières : synthèse hydrogéologique par bassins versants

Du fait de sa position de seuil entre 2 grands bassins, la région Poitou-Charentes se caractérise par des nappes   de couches sédimentaires assez peu profondes, principalement calcaires, et en relation étroite avec les cours d’eau. Ces nappes   présentent de ce fait des cycles annuels caractéristiques parallèles aux cycles des eaux de surface. Une synthèse par bassins versants, axées sur les relations nappes  /rivières a été réalisée sous forme d’atlas en 2005. Ce travail est présenté ici.

Sommaire de l’article :

Carte des bassins versants

Préambule

Située aux confins de 2 grands bassins sédimentaires, les bassins Aquitain et Parisien, et de 2 socles anciens, les massifs Central et Armoricain, la région Poitou-Charentes connaît un contexte hydrologique et hydrogéologique difficile. Les ressources profondes en eau souterraine sont en effet réduites, à la différence des régions situées en position plus centrale par rapport aux bassins sédimentaires, la région aquitaine au Sud et la région centre au Nord. Les graphes de suivi piézométrique   du réseau régional ne montrent pas d’évolution significative sur le long terme, preuve que les ressources sont généralement annuellement renouvelées et que les nappes   sont en étroites relations avec les rivières. En revanche, les étiages sont difficiles entraînant des conflits d’usage aigus entre l’Alimentation en Eau Potable  , l’agriculture et les utilisateurs des cours d’eau : pêcheurs, propriétaires de moulin, préservation de la faune aquatique, besoins en eau douce des activités littorales comme l’ostréiculture et la mytiliculture.

A travers cet atlas, la DIREN souhaitait disposer d’un document permettant d’avoir une vision synthétique sur chaque grand bassin   versant du territoire régional. Le découpage retenu fut celui de la base BDCARTHAGE des Agences de l’Eau. Ces bassins ou tronçons de bassin  , au nombre de 21, débordent souvent sur les régions voisines mais seule la partie en Poitou-Charentes est traitée dans les bilans, les analyses et les estimations des prélèvements. La présentation de l’atlas est organisée par grands bassins versants et d’amont à l’aval : la Charente en premier lieu, les bassins périphériques de la Gironde et Dordogne, la Sèvre-Niortaise, les bassins du socle armoricain, le bassin   de la Vienne.

Ce document est basé sur la synthèse d’un grand nombre de données disponibles à la date de réalisation de ce travail (2004) : les documents de synthèse déjà réalisés (les nombres entre crochets dans le texte renvoient à la bibliographie en fin de document), la géologie et l’hydrogéologie  , la Banque de données du Sous-Sol, les données de prélèvement   des DDAF et des Agences de l’Eau, le Modèle Numérique de Terrain au pas de 50 m (IGN), les relevés hydrologiques de la banque HYDRO (DIREN-MEDD), les relevés météorologiques (METEOFRANCE) et piézométriques (Conseil Régional). Ce croisement de données conduit à proposer des hypothèses sur le fonctionnement de ces bassins versants. Parallèlement, une quantification des prélèvements est réalisée pour une année moyenne avec une incertitude plus ou moins forte en fonction des données disponibles. Enfin, des orientations en matière de gestion sont proposées.

Téléchargement des fiches par bassin   versant

Charente amont
Charente moyenne
Tardoire, Bandiat, Bonnieure
Antenne et Charente moyenne
Charente et Né
Charente et Seugne
Boutonne
Charente aval
Seudre et Gironde
Dordogne
Sèvre Niortaise
Autize
Mignon et Courance
Cure et Cotiers
Sèvre Nantaise
Thouet, Cébron, Argenton, Dive
Clain
Vienne amont
Vienne aval, Loire, Ozon
Gartempe
Creuse

Synthèse générale

Grille de lecture

GEOLOGIE ET HYDROGEOLOGIE

La géologie et l’hydrogéologie   du bassin   versant y sont résumées. Cette partie est accompagnée en général d’illustrations (coupes, log…) permettant de préciser les descriptions. On trouve également avec cette partie une présentation géomorphologique du bassin   versant à travers un bloc-diagramme réalisé à partir du Modèle Numérique de l’IGN au pas de 50 m et à travers un tableau de synthèse. Dans ce tableau les altitudes sont exprimées en m NGF et l’indice de compacité est calculé (dans les cas où il est représentatif) à partir de la formule : (avec P : périmètre et A : superficie).

La carte avec les points d’eau sur un fond géologique complète cette partie. Les points d’eau y sont analysés en fonction de leur type (forage, puits, source  ), de leur profondeur et de la nappe   captée.

SYSTEMES AQUIFERES ET PRELEVEMENTS

La liste des systèmes aquifères   libres (d’après le référentiel national V1 amélioré) et captifs du bassin   versant (région Poitou-Charentes uniquement) est ici donnée.

Dans le tableau, à chaque système est associée une estimation de l’ordre de grandeur des paramètres hydrodynamiques : T, T, T (pour transmissivité faible, moyenne ou élevée), s, S, S (pour emmagasinement   faible, moyen, élevé).

Le nombre d’ouvrages correspond au nombre de points d’eau dans la Base de données du Sous-Sol, qui comporte actuellement plus de 17000 références pour la région Poitou-Charentes. Les prélèvements AEP   sont estimés à partir des volumes annuels des fichiers de l’Agence de l’Eau pour le bassin   Adour-Garonne. En Loire-Bretagne, en revanche, ces fichiers n’ont pu être exploités car les déclarations font référence à des compteurs et à des syndicats et non à des points de prélèvement  . Pour ce bassin  , les prélèvements sont très partiels et font référence aux données directement collectées auprès des exploitants.

Les prélèvements agricoles sont calculés en multipliant le débit autorisé, pour les départements de Charente, Charente-Maritime et Vienne, ou le débit moyen, pour le département des Deux-Sèvres, par 12 heures et 90 jours. Ces calculs auraient plutôt tendance à majorer la valeur trouvée, compensant par ailleurs la non-exhaustivité des points de prélèvement  . Ces valeurs restent cohérentes cependant avec les chiffres trouvés dans des études récentes, en particulier celle de la CACG basée sur les surfaces irriguées. Un ordre de grandeur des prélèvements totaux en nappe   pour le bassin   versant et pour la région Poitou-Charentes est proposé.

La carte du bassin   avec les systèmes aquifères   « libres », les points d’eau représentés en fonction de leur utilisation et du volume prélevé et les piézométries disponibles, illustre cette partie. Parmi les points d’eau, extraction de la Banque de données du Sous-Sol (BSS), de nombreux ouvrages sont abandonnés, rebouchés ou « oubliés », mais ils peuvent donner cependant des informations importantes sur les aquifères  . Peuvent figurer ainsi sur cette cartographie des ouvrages AEP   qui ne sont plus exploités ou qui ont été réalisés dans le cadre d’une recherche d’eau potable (et qui se sont révélés éventuellement non productifs).

SUIVI METEOROLOGIQUE

Cette partie brosse un rapide tour d’horizon des stations météorologiques du bassin   versant. Les informations ne sont pas obligatoirement exhaustives et l’on se reportera éventuellement au serveur de MétéoFrance. Dans ce chapitre une estimation de la Réserve Utile moyenne est aussi donnée.

SUIVI HYDROLOGIQUE

Le tableau énumère les stations du bassin   versant. Les informations ont été prises sur le site de la banque HYDRO du MEDD. Elles sont indicatives et l’on se reportera à ce site internet pour compléter et préciser les données.

Une analyse du réseau hydrographique   est aussi réalisée à partir du contexte géologique et hydrogéologique. Des hydrogrammes de stations sont présentés et des comparaisons aval/amont sont faites dans la mesure du possible. L’analyse de ces graphes permet éventuellement de reconnaître les zones de pertes ou inversement d’alimentation anormale et d’identifier le régime du cours d’eau.

BILANS ECOULEMENT/RUISSELLEMENT

Un bilan entrées par les pluies, sorties par les rivières est réalisé, par période de 4 mois, à partir des données disponibles : données de la banque HYDRO et écoulement d’une station météorologique. Une Réserve Utile de 100 mm a été considérée pour ces dernières données. L’écoulement, à un pas décadaire, a été appliqué sur la superficie du bassin   versant de la station hydrologique. Ce travail a été réalisé sur 3 cycles : 2000/2001, cycle particulièrement pluvieux, 2001/2002, cycle particulièrement sec, 2002/2003, cycle plus normal. Ces bilans permettent de préciser le fonctionnement du cours d’eau en fonction des périodes. Ils peuvent mettre en évidence des déséquilibres importants pouvant traduire des échanges entre bassins versants, une mauvaise estimation de la Réserve Utile ou une mauvaise représentativité de la station météorologique choisie.

SUIVI PIEZOMETRIQUE

La liste des piézomètres du bassin   versant est donnée dans le tableau. Les données sont extraites des bilans annuels (2002 seul disponible au début de ce travail) réalisés par l’ORE. Ces informations figurent ici à titre indicatif et l’on se reportera au site de l’ORE pour disposer de données plus précises et actualisées. Les fourchettes Mini-Maxi en particulier sont calculées sommairement à partir des chroniques pour évaluer approximativement le battement annuel de la nappe   sur l’ouvrage.

REGLEMENTATION

Un rapide tour d’horizon de la réglementation en vigueur en 2004 est donné dans ce chapitre en utilisant les arrêtés préfectoraux.

SYNTHESE

La synthèse s’appuie en règle générale sur un graphe croisant, sur un cycle hydrologique, les pluies, les hydrogrammes et les chroniques piézométriques. Cette synthèse reprend les informations caractérisant le fonctionnement du bassin   versant. Des propositions sont aussi faites en matière de gestion. Enfin, une cartographie du bassin  , avec les réseaux de mesures et éventuellement des éléments permettant d’illustrer les relations nappe  /rivière, accompagne cette synthèse.

Synthèse générale

La nature géologique du sous-sol et la fracturation se lisent non-seulement dans la topographie mais aussi dans le réseau hydrographique  . Celui est dense sur des formations peu perméables et sans ressources souterraines importantes, et pratiquement inexistant dans les zones à substratum karstique  , témoignant de la prépondérance des circulations souterraines. La Région Poitou-Charentes, de par sa situation, est très variée d’un point de vue géologique. Une autre caractéristique de la région est d’être traversée par un grand nombre d’accidents profonds ce qui entraîne une importante fracturation du substratum géologique. On y distingue 4 grands types de contexte hydrogéologique et, par voie de conséquence, de réseau hydrographique  .

Sur le socle Armoricain et du Massif Central, le réseau hydrographique   est dense et très bien distribué traduisant un bon drainage des eaux météoriques. Dans le sous-sol, la frange d’altération et de fracturation contient des nappes  , en général peu productives et peu profondes (profondeur de la zone aquifère   en général inférieure à 50 m). Ces nappes   circulent selon la topographie, le bassin   versant topographique correspondant alors au bassin   versant souterrain. Du fait qu’il n’y ait pas de stocks souterrains conséquents, les cours d’eau réagissent rapidement à la pluviosité et les graphes hydrologiques montrent des crues et des décrues rapides avec peu de décalage par rapport à l’épisode pluvieux. Les bassins versants concernés par ce type de substratum sont : la Sèvre Nantaise et le Thouet (pro-parte), les parties amont de l’Autize, de la Vienne, de la Gartempe, de la Creuse, de la Charente et de certains affluents du Clain. Ces secteurs sont favorables à des aménagements de retenues, comme c’est déjà le cas dans les bassins de la Sèvre Niortaise (La Touche Poupard) et de la Charente.

Schéma d’une nappe de socle

Au-dessus du socle, dans les 2 bassins sédimentaires, on trouve 2 grands systèmes aquifères   karstiques   : l’Infra-Toarcien à la base et le Dogger. Le réseau hydrographique   y est très peu dense. Les circulations des eaux se font en souterrain avec des exutoires parfois très importants comme les Viviers à Niort et la Touvre prés d’Angoulême (seconde source   de France par son débit). Les rivières peuvent se perdre complètement dans le karst   comme c’est le cas pour la Dive du Sud et la Bouleure à Lezay, la Tardoire et le Bandiat. Les bassins versants topographiques ne correspondent pas forcément aux bassins souterrains. Des transferts d’eau sont fréquents d’un bassin   topographique à l’autre. C’est en particulier le cas sur le Seuil du Poitou, zone où les rivières hésitent entre bassin   de Paris et bassin   Aquitain. La ligne de séparation des eaux peut toutefois être tracée et correspond à la direction structurale majeure : NO-SE.

Ce contexte se retrouve principalement dans le département de la Vienne, et dans une moindre mesure en Deux-Sèvres et dans le Nord du département de la Charente. Les bassins les plus concernés sont : le Clain et ses affluents, la partie amont de la Sèvre Niortaise, la Dive du Nord, la partie amont de la Charente. Ces aquifères   disposent à la fois de capacités de stockage et de bonnes perméabilités. Les hydrogrammes des rivières montrent des décrues relativement atténuées par l’apport des nappes  . Les pics de crue sont souvent décalés d’environ 2 jours par rapport à l’épisode pluvieux. L’hydrogramme de la Touvre illustre à l’extrême cette capacité d’amortissement des transferts souterrains. Les rivières disposent donc de stocks tampons souterrains permettant de les alimenter l’été. Les bassins versants concernés ont des étiages un peu moins critiques que dans les autres secteurs de la région.

Schéma d’une nappe karstique

Le troisième type de situation hydrogéologique correspond aux domaines à aquifère   fissuré. Le Jurassique supérieur, en général calcaréo-marneux   et peu perméable, contient dans ses zones d’affleurement   une nappe   superficielle correspondant à une frange d’altération et de fissuration. L’épaisseur de cette frange est rarement supérieure à 30 m. Les eaux circulent, globalement selon la topographie, dans le réseau de fissures et de plans de stratification. Ce réservoir est peu capacitif mais assez fortement transmissif. Le régime des rivières traduit ces propriétés. Les eaux de pluie sont en effet rapidement évacuées vers les rivières qui présentent des hydrogrammes assez peu amortis. L’été la nappe   s’épuise rapidement, décroche de la rivière dans les zones amont ce qui peut entraîner des assecs sévères. Les bassins versants concernés sont la Pallu au Nord, ceux du Mignon-Courance, du Curé, de l’Aume-Couture, de l’Antenne, de la Boutonne et de la Devise. Dans ces bassins versants, les prélèvements souvent importants viennent aggraver une situation à l’étiage   naturellement difficile.

Schéma d’une nappe de type fissuré

Dans la partie méridionale de la région, les nappes   du Crétacé supérieur présentent un contexte intermédiaire entre les 2 derniers types de situation décrits précédemment. Le Turonien-Coniacien et dans une moindre mesure le Cénomanien correspondent à un contexte karstique  . Dans les zones d’affleurement   de ces terrains les réseaux hydrographiques sont peu denses. En revanche, l’importante couverture calcaréo-marneuse, qui vient au-dessus de ces formations, est peu perméable à imperméable. Elle peut toutefois se trouver fissurée et permettrent des échanges des nappes   profondes avec la surface. On trouve aussi dans la frange d’altération de ces terrains marneux   en surface une nappe   de milieu fissuré à productivité médiocre.

Enfin, le dernier type d’aquifère   correspond au réservoir à matrice principalement sableuse. L’eau est contenue entre les grains de la matrice. Ces réservoirs sont fortement capacitifs mais en revanche peu transmissifs. Les graphes des piézomètres montrent en général des battements faibles traduisant cet effet capacitif. Le réseau hydrographique   est dense sur un tel substratum. Par ailleurs, le débit des rivières est assez soutenu par ces nappes   en période d’étiage  . On rencontre ce type de contexte au Nord, dans le Bassin   de Paris, sur le Cénomanien, au Sud, dans le Bassin   Aquitain sur les formations sablo-argileuses du Tertiaire, et plus largement dans toutes les vallées à substratum alluvial.

Schéma d’une nappe contenue dans des sables

Dans tous les cas de figure, l’observation d’un cycle hydrologique (d’un étiage   à l’autre), avec croisement des données hydrologiques, piézométriques et météorologiques, montre un fonctionnement similaire. Les premières pluies de l’automne rechargent la Réserve Utile du sol. La nappe   et la rivière réagissent peu aux épisodes pluvieux. Les pluies suivantes contribuent principalement aux recharges des nappes  . Les rivières réagissent encore assez faiblement. Lorsque nappe   et Réserve Utile sont rechargées, les rivières réagissent nettement aux nouvelles pluies. Enfin, au printemps s’amorce la décrue des rivières et des nappes  . Les caractéristiques de ces dernières, véritables réservoirs tampons, déterminent la sévérité des étiages.

Les relations nappe  /rivière sont donc complexes et souvent variables dans l’année. En effet, dans beaucoup de cas les échanges s’inversent entre les périodes de hautes eaux, où les nappes   viennent plutôt alimenter les rivières, et les périodes de basses eaux où c’est souvent le contraire qui se produit.

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